Arrêts de travaux

 

Arrêts de travaux

De nombreux dispositifs légaux visent à assurer la protection des travailleurs en cas d’exposition à un danger (propriété ou capacité intrinsèque d’un équipement, d’un agent chimique ou biologique généré par les activités ou utilisés dans les procédés de fabrication, d’une méthode de travail de causer un dommage à la santé des travailleurs - article R. 261-4 du code du travail de Nouvelle-Calédonie).

Dans l’entreprise nombreux acteurs sont concernés par la santé et la sécurité au travail : CHSCT, CE, délégué du personnel, service de santé au travail, mais en cas de danger, seul le travailleur peut arrêter de travailler et seuls les agents de contrôle (inspecteur ou contrôleur) ont le pouvoir de faire cesser les travaux.  

C’est en fonction du danger des situations auxquelles les travailleurs sont exposés que des mesures sont engagées :

  • soit à titre préventif (droit d’alerte ou droit de retrait),
  • soit à titre répressif notamment en cas de danger grave et imminent pour la vie du professionnel (arrêt de travaux ou le référé).

Confronté à une situation de travail présentant un risque de dommage pour sa vie, le travailleur dispose du droit d’alerte et du droit de retrait.

L’exercice du droit d’alerte :

L’obligation de sécurité à la charge du travailleur implique le signalement de « toute défectuosité constatée dans les systèmes de sécurité » (article Lp. 261-10, 4° du CTNC), et de toute situation de danger dépassant le risque liée à l’activité professionnelle (article Lp. 261-3 du CTNC).                   

Dès lors que le droit d’alerte est exercé par le salarié, l’employeur a l’obligation de faire cesser la situation dangereuse avant de lui demander de reprendre son activité (article Lp. 261-21 du CTNC).

 Comment exercer le droit d’alerte ?

  • L’alerte peut être donnée verbalement (CE 12 juin 1987, n° 72388).
  • Les textes n’imposant aucune procédure, aucun règlement intérieur ne peut imposer un écrit pour signaler une situation dangereuse à laquelle le travailleur est exposé (CE 29 juin 1990, n° 87015).
  • L’exercice du droit d’alerte n’est pas conditionné à la mise en œuvre de la procédure d’alerte du comité d’hygiène et de sécurité et des conditions de travail (Cass. Soc. 10 mai 2001, n° 00-43.437).

En pratique

Il est conseillé de signaler les disfonctionnements compromettant la sécurité au travail :

  • soit dans le registre (recueil) de sécurité ou de carnet d’entretien d’installations, de machines, et d’engins ;
  • soit au représentant du personnel au sein du CE, du CHSCT, ou au délégué du personnel à l’appui de fiche technique par exemple ;
  • soit d’en informer l’employeur. En l’absence de CE, de CHSCT, ou de délégué du personnel, l’essentiel c’est de garder des preuves des signalements qui lui ont été transmis.

 

Article Lp. 261-21 du CTNC :
Le travailleur alerte immédiatement l’employeur ou son représentant de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

L’employeur ou son représentant ne peut demander au travailleur de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent.
Article Lp. 261-23 du CTNC :Le droit d’alerte est exercé de telle manière qu’il ne puisse créer pour autrui une nouvelle situation de risque grave et imminent.

 

Peut-on être sanctionné pour ne pas avoir alerté son employeur ?

L’article Lp. 261-21 du CTNC fait obligation au salarié de signaler immédiatement la défectuosité ou le danger motivant son refus de travailler.

Est constitutive d’une faute grave justifiant un licenciement sur le plan disciplinaire, le fait pour le salarié de ne pas alerter son employeur dès lors qu’il a conscience du danger, et que cette omission place ses collègues dans l’insécurité (Cass soc. 21 janv. 2009, n° 07-41.935).

En revanche, rien ne peut être reproché au salarié qui n’avait pas conscience du danger, ni à celui qui n’a pas été en mesure de donner l’alerte

Au regard de l’obligation faite au travailleur de veiller à sa sécurité et à celle des autres personnes concernées par ses actes et omissions au travail (article Lp. 261-10 du CTNC), le juge admet que sa responsabilité puisse être engagée (Cass. soc. 28 mai 2008, n°06-40.629).

L’exercice du droit de retrait

Exercé en cas de carence de l’employeur averti de la situation de travail dangereuse, le droit de retrait est un droit et non une obligation (Cass. 9 déc. 2003, n° 02-47579).

Dès lors que le travailleur a un motif raisonnable de penser que la situation présente un danger grave et imminent pour sa santé et sa sécurité il peut décider de s’en extraire sans être sanctionné par son employeur.

 

Article Lp. 261-22 du CTNC  :
Aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un travailleur ou d’un groupe de travailleurs qui se sont retirés d’une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé de chacun d’eux.
Ces dispositions ne peuvent être appliquées qu’en cas de carence de l’employeur ou de son représentant devant la situation de travail qui lui a été présentée soit par le salarié lui-même, soit par un membre du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

 

Quelle situation de travail justifie l’exercice du droit de retrait ?

Quelques situations constitutives d’un danger grave et imminent pour la vie des travailleurs dans lesquelles l’exercice du droit de retrait est justifié :

  • la défaillance du système de freinage du camion de l’entreprise constitue un danger grave et imminent pour la vie du salarié conducteur (CA Montpellier 30 avril 1998, n° 96/00627) ;
  • l’interdiction de circuler d’un camion constitue un motif permettant au salarié chauffeur de refuser de le conduire (Cass. 5 juillet 2000, n° 98-43-481) ;
  • le défaut persistant de conformité des installations de l'entreprise avec les normes de sécurité est constitutif d'une situation dangereuse pour leur vie ou leur santé et permet aux salariés de cesser leur travail (Cass. soc. 1er mars 1995, n° 91-43406).

En revanche, ne constitue pas un risque, ni un motif raisonnable de nature à justifier que le salarié se retire de son poste de travail :

  • le seul fait de travailler sur un site nucléaire (CA Versailles, 26 février 1996, n° 22877/94) ;
  • la présence d’amiante dans l’entreprise (CA Bourges, 15 mai 2009, n° 08/01329>.

 

L’intervention du Comité d’Hygiène, de Sécurité et des conditions de travail en cas de danger (Article Lp. 262-1 et suivants du CTNC).
Dans les établissements de plus de 50 salariés (effectif en continu pendant 12 mois consécutifs), le CHSCT est investi de missions d’analyse des risques professionnels, des conditions de travail.
A cet effet, il propose des missions de prévention des risques professionnels et a le pouvoir de procéder à la vérification (inspections et enquêtes) du respect des prescriptions législatives et réglementaires et de la mise en œuvre des mesures de prévention préconisées (article Lp. 262-7 du CTNC).
Le CHSCT peut recourir, aux frais de l'entreprise, à un expert agréé en cas de risque grave constaté (article Lp. 262-26 du CTNC).
Le CHSCT peut également avoir recours à l'expert intervenant auprès du comité d'entreprise à l'occasion de l'introduction de nouvelles technologies dans l'entreprise.
Dans les entreprises de moins de 50 salariés, le délégué du personnel endosse les missions de CHSCT (Pour en savoir plus se reporter à la fiche CHSCT).

 

En cas de danger grave et imminent ou de risque d’atteinte à l’intégrité physique du travailleur, c’est l’inspecteur du travail ou le contrôleur du travail placé sous son autorité qui décide :

  • soit d’arrêter les travaux pour contraindre l’employeur à prendre les mesures de sécurité qui s’impose pour faire cesser le danger.
  • soit d’engager un référé, procédure par laquelle l’inspecteur saisit le juge d’une situation menaçant gravement la vie du travailleur.

L’arrêt de travaux :

En présence d’un danger grave et imminent pour la vie du travailleur exposé, l’inspecteur prend la décision d’arrêter les travaux sur une zone déterminée. L’arrêt de travaux est assorti de la mesure d’ordre de retrait immédiat des salariés de la situation de danger grave et imminent (article Lp. 264-8 du CTNC).

Cette décision administrative entraîne la suspension des travaux et activités en cours, le temps que des mesures correctives soient apportées pour garantir un niveau de sécurité optimale en vue de la reprise des travaux.

Cette situation résulte d’une infraction à l’obligation générale d’hygiène et de sécurité à la charge de l’employeur pour laquelle un procès-verbal de constat d’infraction peut être établi par l’inspecteur (article Lp. 264-2 du CTNC).

Lorsque l’employeur ou son représentant est présent sur les lieux où le danger est constaté, l’arrêt de travaux lui est remis directement et entraîne l’arrêt immédiat de production ou d’une activité dans une zone (article R. 264-8 du CTNC). A défaut il lui est adressé en urgence par tous moyens appropriés et confirmé en recommandé avec avis de réception.

Quand ?

L’arrêt de travaux est justifié dans une situation de danger grave et imminent qui se caractérise par :

  • le danger : une menace d’une certaine gravité pour la sécurité et la santé des travailleurs ;
  • des faits imminents et d’une certaine gravité : de nature à provoquer une atteinte à leur intégrité physique dont la survenance est très proche et susceptible d’avoir des conséquences sérieuses sur la santé des travailleurs (gravité et imminence).

Dans quelles circonstances ?

L’inspecteur intervient dès lors que le travailleur ne s’extrait pas lui-même d’une situation de danger grave et imminent pour sa vie et sa santé (article Lp. 261-21 du CTNC) notamment en cas de risques :

  • de chute de hauteur,
  • d’ensevelissement dans une tranchée,
  • liés au fonctionnement d’une machine,
  • d’électrisations directes
  • lié à l’inhalation de poussières d’amiante dans les travaux de confinement ou de retrait d’amiante.

Les suites de l’arrêt de travaux :

Suite à la décision d’arrêt des travaux, c’est à l’employeur de rétablir les conditions optimales sécurité. Dès lors qu’il a pris les mesures appropriées pour faire cesser le danger grave et imminent, il en avise par écrit l’inspecteur ou le contrôleur soit par lettre remise en main propre soit par lettre recommandée avec avis de réception (article R. 264-7 du CTNC).

Après vérification entreprise dans les deux jours suivant la demande de l’employeur, l’inspecteur ou le contrôleur décide d’accorder ou pas l’autorisation de reprise des travaux (articles Lp. 264-9 et R. 264-8 du CTNC).

 

Article Lp. 264-9 du CTNC :
Lorsque toutes les mesures ont été prises pour faire cesser la situation de danger grave et imminent ou la situation dangereuse ayant donné lieu à un l’arrêt temporaire de travaux, ’employeur ou son représentant avise l’inspecteur du travail ou le contrôleur du travail, par délégation de l’inspecteur du travail dont il relève et sous son autorité.
Après vérification, l’inspecteur du travail ou le contrôleur du travail, autorise la reprise des travaux ou de l’activité concernée.
Article R. 264-8 du CTNC :
L’inspecteur du travail ou le contrôleur du travail, par délégation de l’inspecteur dont il relève, vérifie d’urgence, et au plus tard dans un délai de deux jours à compter de la date de remise ou de réception de la lettre de l’employeur ou de son représentant prévue à l’article précédent, le caractère approprié des mesures prises pour faire cesser la cause de danger grave et imminent.
La décision d’autorisation ou de refus d’autorisation de reprise des travaux motivé par l’inadéquation ou l’insuffisance de ces mesures est notifiée dans les formes et les délais définis à l’article R. 264-6.

 

En dehors des cas ci-dessus listés, s’il y a un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique du travailleur, une autre action peut être engagée par l’inspecteur : le référé.

La procédure de référé :

C’est en cas de non-respect par l’employeur des principes généraux de santé et sécurité au travail (article Lp. 261-1 et suivants du CTNC) entraînant un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique du travailleur exposé que l’inspecteur saisit le juge des référé en urgence (article Lp. 264-7 du CTNC).

Dès lors que le juge admet l’urgence et le risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique du salarié alors il peut ordonner les mesures suivantes :

  • mise hors service, immobilisation ou encore saisie du matériel, de l’équipement, de la machine ou du dispositif ;
  • fermeture temporaire du chantier ou de l’établissement ;
  • astreinte par jour de retard dans l’exécution des mesures ordonnées au profit de la Nouvelle-Calédonie.

Le prononcé de ces mesures est sans incidence sur les contrats de travail des salariés de l’établissement concerné (ni rupture, ni suspension, ni préjudice financier).

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